Copie d'un article de Mr.Claude CHAMPREDON (Directeur de Recherche honoraire de l'INRA)
De la grippe espagnole à la grippe aviaire
La grippe est une
maladie infectieuse, l’une des plus redoutées en ce début
de millénaire avec le SIDA. Elle est causée par un virus
qui se transmet par voie
respiratoire. Les nombreuses modifications de son génome,
qui lui permettent d’échapper au système
immunitaire, s’effectuent de manière imprévisible
pouvant aboutir à des formes particulièrement graves et très
contagieuses. Elle se manifeste le plus souvent sous forme d’une grippe
saisonnière banale mais parfois sous forme de pandémies extrêmement
meurtrières. C’est donc un envahisseur redoutable pouvant affecter
la totalité de notre
planète en quelques semaines et causer des millions de morts.
La plupart des maladies infectieuses qui affectent l’Homme existent
depuis des millénaires ; les maladies infectieuses ont d’ailleurs
jalonné l’histoire de l’humanité. Une grande partie
d’entre elles proviennent d’animaux domestiques ou sauvages, ce
qui en fait des pathologies d’origine environnementale. Certaines
sont d’émergence
récente (SIDA et SRAS, ...) mais beaucoup apparaissent ou réapparaissent
à la suite de bouleversements des écosystèmes (déforestation,
élevage et agriculture intensifs, retenues d’eau artificielles,
urbanisation, changement climatique) dont l’homme est le principal responsable.
Rares aussi sont les agents infectieux (bactéries, virus, parasites)
qui ont définitivement disparu de notre environnement. La variole humaine
a été éradiquée de la planète, mais des
stocks importants de virus existent, pouvant faire craindre un risque terroriste.
Même la peste, qui hante encore l’inconscient humain, n’a
pas disparu. Elle sévit encore dans certains pays du sud comme l’Inde
et des foyers existent, même aux Etats-unis.
Les maladies infectieuses sont responsables de 1% des décès
dans les pays développés mais de 43% des décès
dans les pays émergents selon l’OMS.
L’agent causal de la grippe est un virus à
ARN qui fait partie de la famille des Orthomyxoviridae,
genre Influenzavirus. Il peut infecter les porcs, les chevaux, les oiseaux
aquatiques et de basse-cour, les mammifères marins et l’Homme.
La forme humaine typique se caractérise par un début brusque,
marqué par une sensation de malaise général, de la fièvre,
des maux de tête et des douleurs
musculaires. Les complications sont le plus souvent
pulmonaires (bronchites, pneumonies) mais peuvent se manifester plus rarement
par des encéphalites, méningites, ou myocardites. La grippe
saisonnière hivernale provoque en moyenne 3 000 décès
chaque année en France. Chaque année, un vaccin est produit
pour la combattre, notamment chez les personnes fragiles ou âgées.
Les virus ne sont pas des êtres vivants, ou plutôt sont à
la limite du vivant et de l’inerte. Ils sont de très petite taille,
souvent inférieure au dixième de micron et seulement visibles
au microscope électronique.
Ils ne comportent pas de noyau
et ne contiennent qu’une seule sorte d’acide
nucléique : ADN
ou ARN, ce qui les différencie des bactéries. Ils n’ont
pas de métabolisme propre et doivent utiliser la machinerie cellulaire de leurs hôtes
pour se reproduire. Ce sont des parasites absolus dans la mesure où
ils sont incapables de survivre longtemps en dehors d’un organisme vivant
capable de les héberger : bactéries,
plantes, insectes, animaux et Homme. Leur action consiste à envahir
les cellules, perturber
leur fonctionnement en déréglant leur messagerie génétique
à leur profit.
Les virus à ARN (grippe, SIDA, SRAS, fièvre jaune,...) se
différencient des virus à ADN (Herpès, variole, hépatite
B,...) par le fait qu’ils ne possèdent pas de mécanisme
de relecture de leur génome permettant de corriger la plupart des erreurs
de codage au cours de leur cycle de multiplication. Cette caractéristique
explique en partie les taux très élevés de mutations
ponctuelles (glissement antigénique) des virus à ARN. La
variabilité génétique de ces derniers ne s’explique
pas seulement par leurs potentialités de mutations, mais aussi par
des recombinaisons et des réassortiments génétiques (cassure)
entre différentes souches. Cette variabilié génétique
favorise l’existence des virus, car elle permet de contourner les défenses
immunitaires de l’hôte.
Les pandémies de grippe sont des épidémies qui se répandent
dans le monde entier en provoquant des maladies graves en raison du fait qu’un
virus nouveau, trouve devant lui une population réceptive (absence
d’immunité). On estime que durant chaque siècle deux à
trois pandémies sévères de grippe peuvent apparaître,
chacune se déroulant parfois en deux ou trois vagues. Les trois pandémies
grippales du XXème siècle (1918-1919, 1957-1958 et 1968-1969)
ont été causées par des virus recombinants d’origine
aviaire.
La grippe est due à plusieurs types de virus (A, B et C) et à
de nombreux sous-types correspondant aux variations des protéines de
surface : les hémagglutinines (H1 à H16) et les neuraminidases
(N1 à N9). Ce sont les virus de type A qui sont responsables des infections
les plus sévères. La pandémie de 1918-1919, dite grippe
espagnole de sous-type A(H1N1) aurait décimé entre 1 à
2% de la population mondiale (20 à 40 millions de morts suivant les
sources mais certains historiens avancent le nombre de 100 millions). Celle
de 1968, dite grippe de Hong Kong, de sous-type A(H3N2), qui est survenue
alors que l’on pouvait combattre les complications, notamment pulmonaires,
grâce à un arsenal d’antibiotiques efficaces, a causé
plus de 16 000 décès en France. La grippe espagnole a marqué
les esprits par sa soudaineté, la rapidité de diffusion du virus
et la crainte d’une nouvelle pandémie virale de même intensité
qui pourrait résulter de l’émergence d’un virus
nouveau.
Le contexte écologique actuel est très différent de celui
de 1918 : démographie mondiale (moins de deux milliards d’êtres
humains en 1918 et plus de six actuellement) et forte proportion de personnes
vivant en milieu urbain (plus d’un humain sur deux se presse maintenant
dans une ville). Les agglomérations de plus d’un million d’habitants
étaient peu nombreuses au début du XXème siècle
(16 en 1900 contre 408 en 2003). Les transports aériens n’existaient
pratiquement pas à cette époque ; les migrations de populations
vers des lieux de pèlerinages, de culture, de vacances ou de loisirs
(stations balnéaires, festivals divers où la promiscuité
est de règle) étaient alors nettement moins massives que maintenant
en raison de l’insuffisance des moyens de transport).
Les virus A et B de la grippe possèdent un génome comportant
huit segments d’ARN. Lorsque deux virus grippaux différents
infectent un même hôte susceptible de les héberger (porc,
oiseau ou homme), il peut se produire un mélange des différents
segments au cours du cycle de réplication de la particule virale (ou
virion). La résultante de ce mélange possèdera, elle
aussi, un génome segmenté mais avec huit fragments en provenance
des deux virus présents chez l’hôte. Par ce mécanisme
de co-infection et de réassortiment, un virus totalement nouveau pour
le système immunitaire, peut faire son apparition dans l’environnement.
Les véritables réservoirs du virus de la grippe sont les oiseaux
aquatiques, notamment le canard sauvage qui peut être porteur sain.
Leurs déjections, parfois contaminées, sont consommées
par des canards ou autres oiseaux d’élevage dont les fientes
infectent les porcs, exceptionnellement les humains. C’est généralement
chez le porc, animal réceptif aux virus grippaux à la fois humains
et aviaires, que s’opèrent des modifications du génome
viral rendant alors la maladie transmissible d’homme à homme.
Ce phénomène peut aussi se produire, mais plus difficilement,
chez l’homme. L’émergence d’une épidémie
de grippe est favorisée lorsqu’il y a, par exemple, promiscuité
entre les porcs et les oiseaux d’élevage avec une densité
humaine élevée. Cette condition est remplie en Asie où
existent des élevages souvent juxtaposés combinant les deux
espèces. Les conditions d’élevage en Bretagne et aux Pays-Bas
où les productions industrielles de volailles et de porcs sont concentrées
sur des territoires restreints pourraient ussi favoriser, certes à
un degré bien moindre qu’en Asie, l’apparition de
nouvelles épidémies de grippe.
L’exemple récent du SRAS permet de visualiser la dynamique d’une
épidémie. Bien que la contagiosité du SRAS soit plus
faible que celle de la grippe ordinaire, environ 8500 cas ont été
observés dans 32 pays, causant 916 décès (21% dans le
personnel de santé). Une catastrophe sanitaire a été
évitée de justesse, grâce à l’efficacité
du réseau de surveillance de l’OMS. Contre cette infection
pulmonaire, due à un coronavirus7, on ne dispose pas de traitement
ni de vaccin. Le réservoir du virus n’est pas parfaitement connu,
bien que la civette puis la chauve souris (rhinolophe) aient été
citées. Le premier cas de SRAS est apparu en Chine, à proximité
de Canton vers la mi-novembre 2002. Quelques mois plus tard, la maladie a
gagné Hong Kong pour se répartir en divers endroits du monde
(Hanoi, Toronto, Singapour,....), mettant à profit la rapidité
des transports aériens. L’alerte mondiale était déclenchée
par l’OMS le 12 mars 2003. Les moyens mis ensuite en oeuvre (mesures
d’isolement des malades et restriction des voyages) pour éviter
une pandémie de SRAS, qui peut toujours ressurgir, constituent une
bonne répétition des mesures à prendre en cas d’émergence
d’une pandémie de grippe résultant de l’apparition
d’un virus recombinant. Mais dans ce dernier cas, ce pourrait être
une toute autre affaire !
Ce que tous les experts redoutent en cette fin de 2005, c’est une pandémie
de grippe consécutive à la dispersion planétaire d’un
virus nouveau très contagieux pour l’Homme. A l’origine,
le virus responsable serait de sous type A(H5N1), celui même qui sévit
depuis 1997 dans les élevages avicoles notamment en Extrême-Orient.
Actuellement, il se transmet très difficilement des volailles domestiques
à l’Homme, mais a cependant causé en Asie le décès
de plusieurs dizaines de personnes ayant eu des contacts avec des oiseaux
malades ou leurs déjections (134 cas d’infection humaine et 69
décès depuis décembre 2003 selon l’OMS). La transmission
d’homme à homme n’a pas encore été observée.
L’émergence de la catastrophe sanitaire mondiale résulterait
de la recombinaison du virus aviaire avec une souche humaine saisonnière,
A(H3N2) par exemple, avec un potentiel élevé de transmission
interhumaine ; les caractéristiques du virus A(H5N1) ne permettant
pas encore une telle transmission. A l’heure actuelle, il n’existe
aucun vaccin humain contre la grippe aviaire A(H5N1).
Depuis le début de l’épizootie (épidémie
animale) A(H5N1), en fin de 2003, 15 pays ont été touchés :
Cambodge, Chine, Corée du Sud, Croatie, Indonésie, Japon, Kazakhstan,
Laos, Malaisie, Mongolie, Roumanie, Russie, Thaïlande, Turquie et Vietnam.
Le virus a donc déjà franchi les frontières orientales
de l’Europe. Il est strictement interdit d’importer vers la France
des volailles en provenance de pays où une contamination a été
observée. La consommation d’animaux ou d’oeufs mis à
la disposition des consommateurs français ne présente pas de
risque sanitaire, d’autant plus que la cuisson détruit le virus
grippal. La dinde de Noël ne devrait donc pas déserter nos assiettes
en cette fin de 2005.
En théorie, il existe des moyens pour enrayer ou limiter les conséquences
d’une pandémie grippale de type A(H5N1) : mesures de protection
et d’isolement, antiviraux spécifiques, médication symptomatique
et vaccination des personnes lorsque le vaccin sera disponible. La stratégie
mise en oeuvre actuellement consiste donc à détruire la totalité
des élevages dans lesquels des animaux malades ont été
observés. Cette mesure étant associée à une désinfection
totale des bâtiments et la mise en place d’une barrière
sanitaire. Cette stratégie, lorsqu’elle est mise en oeuvre, se
traduit localement par un désastre économique et alimentaire.
Pour une population vivant dans des conditions de grande précarité
et à la limite de la sous-nutrition, la consommation de protéines
de bonne qualité (oeufs et viande de volailles) est essentielle, notamment
pour les enfants et adolescents. La tentation est grande de dissimuler une
mortalité anormale dans un élevage d’animaux destinés
à la vente ou même à la consommation familiale.
La vaccination des volailles est sujette à controverses entre experts
en raison des résultats inconstants obtenus dans un passé récent.
De plus, elle pourrait n’assurer qu’une protection clinique sans
garantie sur l’aspect épidémiologique. Cependant, une
conférence internationale, à l’initiative de l’OMS,
de l’OIE et de la FAO qui s’est tenue en juillet 2005, avec pour
objectif de recommander des mesures à prendre pour prévenir
la propagation du virus, a mis l’accent sur la nécessité
d’élever séparément les différentes espèces
animales (volailles et porcs notamment) et aussi d’entreprendre de vastes
campagnes de vaccination des oiseaux d’élevage.
L’éradication de la totalité des élevages contaminés
risque de ne pas suffire à éviter à terme l’apparition
d’un virus hautement contagieux pour l’Homme. Les mesures prises
localement permettront tout au plus de gagner du temps et permettre aux chercheurs
de perfectionner les moyens biologiques de lutte contre le virus (antiviraux,
vaccins, mesures sanitaires locales). Il faut savoir que pour fabriquer un
vaccin, il faut avant tout isoler et identifier le virus contre lequel ce
moyen de lutte sera dirigé. Tous les vaccins actuels contre la grippe
sont produits par inoculation de virus sur oeufs embryonnés. Pour préparer
le vaccin à grande échelle, il faudra adapter la
technique permettant la culture sur oeufs, car le virus les détruit.
De même, rien ne prouve que le virus tant redouté ne sera pas
résistant aux antiviraux dont on dispose actuellement (zanamivir
ou Relenza et oseltamivir ou Tamiflu).
L’émergence à grande échelle du SIDA s’est
effectuée à la fin de 1980 et le VIH-1 identifié en 1983.
Les premiers cas de SRAS connus remontent à la mi-novembre 2002 et
le coronavirus qui en est responsable a été isolé quelques
mois plus tard. Dans le cas de la grippe « aviaire »,
les scientifiques, médecins et experts sont prêts à y
faire face alors que le virus humain redouté n’a pas encore montré
le bout de son nez. Autrement dit, on redoute une pandémie grippale
dont on soupçonne le responsable mais dont le code barre de sa carte
d’identité comporte des inconnues. Encore faudrait-il vouloir
et pouvoir produire un vaccin efficace pour six milliards d’humains
sachant que le virus A(H5N1) détruit les volailles qui produisent les
oeufs servant à la préparation du vaccin.
Comme il faudra plusieurs mois entre l’éventuelle émergence
du virus humain hautement contagieux et l’obtention à grande
échelle d’un vaccin efficace, il sera urgent de prendre des mesures
de protection des populations. Des mesures draconiennes et impopulaires à
n’en pas douter. Mesures qu’il sera difficile mais impératif
d’expliquer. Devant le risque de transmission, chacun devra éviter
de se rendre dans des lieux rassemblant un nombre élevé de personnes
sans porter un masque efficace (FFP2) aussi longtemps que le risque de contagion
existera. Les conséquences sociales pourraient être considérables :
fermeture des frontières, fermeture des crèches, écoles,
universités, lieux de culte, salles de spectacles ; interdiction
des rencontres sportives et autres rassemblements de personnes dans des espaces
clos. Les transports en commun seraient inutilisables, ce qui implique que
dans les villes où la circulation des automobiles particulières
a été drastiquement entravée, le problème des
transports individuels se posera. Le maintien des malades à domicile
sera inévitable en raison du nombre limité des lits d’hôpitaux.
L’hôpital public pourrait-il d’ailleurs faire face à
un afflux massif de patients qu’il serait impossible de maintenir à
leur domicile? Mais le pire n’est jamais certain.
On peut saluer en France, l’existence d’un plan gouvernemental
de lutte contre la pandémie grippale d'origine aviaire et les mesures
qui ont été prises (achat massif d’antiviraux et de masques).
Le fait que les politiques français aient communiqué sur ce
sujet est assez inhabituel en présence d’un dossier sanitaire
difficile. L’information du public a eu pour conséquence la réduction
de la consommation de volailles, réaction totalement irrationnelle.
Il faut aussi noter que la France dispose d’un potentiel considérable
de production de vaccins (Sanofi-Aventis-Pasteur), dont plus de la moitié
est exportée.
Beaucoup d’incertitudes existent concernant l’éventualité
de l’émergence d’une pandémie grippale. Ce que l’on
redoute le plus, c’est la production d’un virus recombinant, résultat
du mélange de fragments de génomes de virus humains et aviaires
(L’adaptation à l’homme d’un virus strictement aviaire
ne pourrait pas s’effectuer rapidement). Il n’a pas été
observé que le porc était particulièrement réceptif
au virus A(H5N1) ni que l’homme pouvait l’être en dehors
de conditions de promiscuité très sévères. La
maladie se transmet des oiseaux à l’homme ; elle est même
fréquemment mortelle. Cependant, on n’a pas encore observé
de transmission interhumaine avérée, ce qui ne permet pas de
supposer qu’elle n’aura pas lieu. Quant à la virulence
et au degré de transmissibilité de l’éventuel futur virus,
la question reste ouverte. Mais le pire n’est jamais certain.
Mais revenons sur le cas du SRAS. Entre les premiers cas décelés
en automne 2002 près de Canton et l’alerte lancée au printemps
2003 par l’OMS, plusieurs mois se sont écoulés sans que
les autorités chinoises aient réagi. Il est vrai que les symptômes
respiratoires observés n’orientaient pas vers un agent causal
précis. Si ce dernier avait été aussi transmissible que
le virus de la grippe, les quelques mois de répit qui lui ont été
involontairement accordés pour s’implanter dans la population
chinoise auraient permis à une pandémie extrêmement meurtrière
de se développer. On a donc bien frisé la catastrophe.
La pandémie grippale serait-elle inéluctable ? Personne
n’est en mesure d’affirmer si et quand elle apparaîtra bien
qu’elle semble très possible d’après ce qui précède.
Son ampleur pourrait cependant être réduite si des mesures strictes
étaient prises au niveau international, et notamment dans les pays
asiatiques, là où sa probabilité d’émergence
est la plus élevée. Certains de ces pays possèdent des
infrastructures très fragiles en matière sanitaire. Si un virus
grippal nouveau devait apparaître, le moindre retard pour alerter les
autorités sanitaires pourrait avoir des conséquences dramatiques
pour l’ensemble de l’humanité. Chaque minute comptera.
Double.
Claude CHAMPREDON (Directeur de Recherche honoraire de l'INRA)
1 Constitué d’ADN ou d’ARN, il contient toute l’information
nécessaire à la construction et au fonctionnement d’un
être vivant.
2 Acide ribonucléique. Les ARN copient l’information génétique
et la traduisent en protéines. Chez certains virus (grippe, ...) l’ARN
est à la fois support de l’information génétique
et le messager de cette information dans les cellules de l’hôte.
3 Ce groupe comprend essentiellement les virus des différentes grippes.
4 Acide désoxyribonucléique. C’est le support de l’information
génétique.
5 Protéine
de surface qui permet au virus de pénétrer à l’intérieur
des cellules.
6 Protéine de surface qui favorise la libération et la dissémination
des particules virales qui se forment à l’intérieur des
cellules humaines.
7 Les Coronavirus (en forme de couronne) sont des virus à ARN qui infectent
les oiseaux et beaucoup de mammifères, y compris les humains. Ils sont
surtout responsables de pathologies respiratoires ou digestives.
dernière mise à jour de cette page: 19 avril 2006
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Article de Jean-Yves Nau paru dans le monde édition du 30.10.05 Jusqu'où conduira l'application du principe de précaution dans le champ du sanitaire ? Les derniers développements de l'affaire de la grippe aviaire fournissent des élémentsde réponse particulièrement éclairants. L'emballement sécuritaire sans précédent auquel on assiste aujourd'hui trouve son origine dans la désorganisation qui règne dans les rapports entre l'évaluation scientifique du risque et la gestion politique de ce dernier.Alors que les récentes crises sanitaires touchant le secteur alimentaire au premier rang celle de la vache folle avaient permis de construire, puis de théoriser, cette articulation entre le savoir et le pouvoir, la prise de conscience de l'existence d'un risque de pandémie de grippe hautement meurtrière a curieusement totalement bouleversé les équilibres qui avaient été trouvés. Deux exemples viennent, ces derniers jours, témoigner des impasses auxquelles peut mener l'application d'un principe à la fois mal conceptualisé et inscrit dans la Constitution. Le premier exemple concerne la décision de confiner, en France,les élevages d'oiseaux domestiques. Le second est la mise en garde, lancée par l'Union européenne, à l'encontre de la consommation d'oeufs crus et de viandes de volaille qui auraient été insuffisamment cuites. Car aucun véritable fondement rationnel ne permet, dans ces deux cas, de justifier la décision politique. *INCOHÉRENCE*Comme l'Allemagne, l'Autriche et les Pays-Bas, la France a ainsi décidé que dans vingt-six départements tout devait être mis en oeuvre pour que les oiseaux d'élevage et de compagnie ne puissent plus être en contact, direct ou indirect, avec des oiseaux sauvages et migrateurs. Il s'agit, par cette mesure, de réduire le risque de contamination des élevages d'oiseaux domestiques par des oiseaux migrateurs venus de l'est du continent européen et qui seraient des porteurs sains du virus H5N1.Or cette décision a été prise alors même que les experts de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), saisis du dossier par le gouvernement, venaient de conclure que ce risque était /"négligeable"/ en France.Brutalement désavoués par le gouvernement, les experts comprennent mal cette incohérence. Ils s'interrogent sur les raisons qui conduisent les responsables politiques, invoquant le principe de précaution, à prendre des mesures que ne justifie pas une analyse rationnelle de la situation. Il y a quelques années, on a vu, dans l'affaire de la vache folle, des responsables politiques s'opposer à des mesures interdisant la consommation ou l'utilisation d'abats de bovin préconisées par les experts au motif qu'elles pourraient mettre à mal des filières industrielles. En février 2001, après un avis de l'Afssa recommandant d'allonger la liste des organes ovins et caprins interdits à la consommation,Jacques Chirac devait qualifier cette agence d'"/ irresponsable"/ et dénoncer à cette occasion le principe de précaution.Cinq ans plus tard, on voit le gouvernement choisir d'aller plus in que les recommandations des scientifiques, sans se soucier des impacts sur les filières concernées.Le second exemple est plus significatif encore. Mercredi 26 octobre, les responsables de la jeune Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA) ont, toujours sur le thème de la prévention de l'émergence d'une pandémie grippale, suscité un vif mécontentement auprès de la Commission européenne en publiant une série de recommandations étonnantes. *FLÉCHISSEMENT DES VENTES* Tout en reconnaissant qu'aucun élément scientifique ne permet aujourd'hui de démontrer que le virus H5N1 peut contaminer l'organisme humain par voie digestive, ces mêmes responsables expliquent qu'aucun élément scientifique ne permet d'exclure cette hypothèse. Un raisonnement imparable,mais qui se situe aux antipodes de la démarche de l'expertise et qui autorise toutes les conclusions.Les responsables de l'EFSA en tirent la conséquence que les consommateurs européens devraient dorénavant s'abstenir de consommer des oeufs crus et s'attacher à cuire durablement les viandes de volaille. On imagine la réaction des producteurs au moment même où tous les indicateurs montrent un notable fléchissement des ventes de viandes de volaille en différents points de l'Union./ "En termes de grippe aviaire, nous ne considérons pas qu'il y a un risque lié à la consommation d'oeufs crus ou cuits/ , a aussitôt affirmé le porte-parole de Markos Kyprianou, commissaire européen à la santé. /Le virus de la grippe aviaire n'est pas présent dans les produits commerciaux de volaille dans l'Union Européenne, et nous considérons que la viande de volaille et les oeufs, surtout quand ils sont bien cuits, ne posent aucun problème de santé humaine."/Cette déclaration sera-t-elle de nature à rassurer des consommateurs ? Plus généralement, comment imaginer que les responsables politiques puissent communiquer de manière raisonnable et crédible dès lors que leurs décisions ne sont pas calquées sur une véritable expertise de qualité à la fois fiable et indépendante ? Les dernières grandes crises sanitaires d'ordre alimentaire ont démontré qu'arrive toujours un moment à partir duquel les argumentaires les plus rationnels ne deviennent plus audibles. On vit jadis Jean Glavany, alors ministre de l'agriculture confronté à la crise de la vache folle, déguster en souriant une côte de boeuf devant les caméras de télévision. On entend aujourd'hui l'actuel ministre Dominique Bussereau déclarer sa confiance dans les viandes des volailles tricolores. Mais rien n'y fait. C'est sans doute que le discrédit des politiques s'ajoute, ici, aux vieux spectres de l'empoisonnement collectif et de la contamination mortelle dans des sociétés industrielles dont les membres ne connaissent plus l'origine réelle de la plupart de leurs aliments.*Jean-Yves Nau* Article paru dans le monde édition du 30.10.05*