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Rencontre avec... PASCAL BRANDYS, PRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL DE GENSET

Thérapies géniques : le compte à rebours à commencé

Premier producteur mondial d'ADN de synthèse avec plus de 30% du marché, Genset poursuit actuellement des recherches sur la régulation des gènes. Baptisés promoteurs, les éléments de régulation qui conditionnent l'expression génétique sont très peu connus. La connaissance de ces parties du génome devrait conduire au véritable essor des thérapies géniques. Afin de réaliser ce travail d'analyse des régions régulatrices du génome humain, Genset, en collaboration avec le Généthon (créé en 1990 par l'Association Française contre les Myopathies - AFM - et le Centre d'Etude du Polymorphisme Humain - CEPH - ), vient d'ouvrir un laboratoire dans la région parisienne, à Evry où se développe le pôle technologique français de la thérapie génique. TGS (Très Grand Séquençage), tel est le nom de cette unité, actuellement la plus performante au monde, dont les moyens informatiques permettent d'analyser 1 million de bases par jour. Grâce à cet extraordinaire outil, la carte du génome de régulation devrait être dressée à la fin de 1996 et conduire au développement d'applications thérapeutiques spécifiques. Président Directeur Général de Genset, Pascal Brandys nous présente cette société et nous parle de ses développements futurs. Propos recueillis par Jean-François Desessard.

Jean-François Desessard - Pouvez-vous nous rappeler comment s'est développé Genset ?

Pascal Brandys - La société a été créée en 1989. Ses fondateurs viennent à la fois de la finance, de l'université et du CNRS. Je crois que cette symbiose entre le capital-risque et le monde de la science est une bonne formule. Un des grands principes de la société a été de développer en parallèle des activités commerciales et de production et des activités de recherche et de développement et de maintenir un bon équilibre entre les deux, contrairement aux sociétés de biotechnologies, notamment américaines, qui, au début, réalisent énormément de recherches sans aucune activité commerciale. Aujourd'hui, nous fonctionnons encore dans cette logique. Sur les 110 personnes travaillant dans la société, plus d'une moitié, environ 60, s'occupent de recherche et développement.

Un des aspects importants est que Genset s'est internationalisée très rapidement. En matière de synthèse de l'ADN, nous possédons aujourd'hui un réseau mondial et des filiales à l'étranger. Il y a un peu plus de deux ans et demi, nous avons créé aux Etats-Unis une filiale à San Diego, en Californie, qui produit et commercialise. Plus récemment, il y a environ un an, nous avons renouvellé cette expérience à Tokyo, au Japon. Nous réfléchissons par ailleurs à des implantations industrielles en Asie.

Concernant la synthèse de l'ADN nous sommes aujourd'hui le numéro un mondial avec environ un tiers du marché mondial qui devrait atteindre cette année environ 150 millions de francs. Genset est très présent sur les principaux marchés que sont les Etats-Unis, la France et le Japon.

J.F. D - Comment s'est initiée votre collaboration avec le Généthon ?

Pascal Brandys - Comme vous le savez, la recherche en génétique est dominée en France par le Généthon et le Centre d'Etude du Polymorphisme humain. En tant qu'industriel de l'ADN nous avons donc établis, très tôt, des relations avec ces organismes de recherche. Ces grands projets de cartographie ou de séquençage du génome humain nécessitent en effet de l'ADN en très grande quantité. En biologie moléculaire et en génétique, l'ADN synthétique est aujourd'hui un véritable "outil à tout faire".

C'est ainsi que nous avons développé la première unité de production véritablement industrielle avec un très haut degré d'automatisation. Ceci nous a conduit à développer également nos propres technologies qui ont fait l'objet de différents brevets. Historiquement, nous avons servis les besoins du Généthon par rapport à la carte physique de Daniel Cohen et la carte génétique de Jean Weissenbach. Par ailleurs, nous avons été fournisseur pour tout un ensemble de projets au niveau mondial, notamment aux Etats-Unis.

A côté de cette activité, Genset avait d'autre part des travaux concernant l'utilisation de l'ADN synthétique directement comme médicament. Nous avons développé en effet une approche qui consiste à utiliser de l'ADN, des oligonucléotides, qui sont en fait de véritables leurres et vont interférer avec l'expression des gènes. Ces travaux nous ont amené à être de plus en plus impliqués dans la régulation des gènes. Avec l'AFM et le Généthon nous avons donc compris qu'il était urgent à présent de réaliser un effort assez fondamental de recherche et d'analyse de l'information au niveau du génome. Car en fait, rien n'avait été fait jusqu'à présent dans ce secteur. Or la régulation est tout aussi importante que les gènes eux-mêmes. Possédant des outils thérapeutiques très intéressants, nous avons donc décidé de concevoir une première unité de séquençage à très grande échelle dont la première vocation est de faire l'analyse complète du système de régulation du génome.

Ce programme qui devrait s'achever fin 1996 nous a conduit, en association avec l'AFM, à construire à Evry le TGS (Très Grand Séquençage). Unique en son genre, ce laboratoire est aujourd'hui capable d'analyser jusqu'à un million de bases par jour. Pour nous, le TGS est en fait une activité pilote avec laquelle nous développons tout un savoir-faire que nous pourrons par la suite appliquer à d'autres programmes d'analyse du génome.

J.F. D - Existe-t-il aujourd'hui dans le monde d'autres laboratoires du type TGS ?

Pascal Brandys - Il existe des projets publics, notamment aux Etats-Unis comme celui du NIH ou du Department of Energy. mais ceux-ci ne sont pas systématisés et industrialisés. D'autres projets, issus de sociétés privées, sont également en cours de développement. mais tous ne s'intéressent qu'aux régions exprimées, c'est-à-dire aux gènes eux-mêmes. Il s'agit donc de travaux bien différents de ceux que nous poursuivons sur la régulation. Néanmoins, ces deux démarches sont très complémentaires. Une chose est évidente : le TGS est actuellement l'unité la plus performante au monde.

J.F. D - Comment voyez-vous l'avenir de Genset ?

Pascal Brandys - Nous avons toujours été une société de services. S'il est vrai que nous vendons des produits, chaque molécule qui sort de chez nous est une molécule réalisée sur commande. Aujourd'hui, nous concevons des centaines de molécules dont chacune à sa spécificité. Notre travail est donc très proche d'une activité de service.

Notre but est donc de développer les produits mais surtout les services indispensables à l'industrie pharmaceutique de demain. Nous n'avons pas l'ambition de fabriquer le produit final. Il existe assez de sociétés très compétentes pour mener à bien cette tâche.

J.F. D - Les sociétés de biotechnologies ne risquent-elles pas de se faire "manger" par les grands groupes pharmaceutiques ?

Pascal Brandys - Pas vraiment. Si vous regardez ce qui s'est passé jusqu'à présent entre le secteur des biotechnologies et l'industrie pharmaceutique, vous vous rendez compte que s'il y a eu des acquisitions, les sociétés de biotechnologies une fois rachetées sont restées néanmoins assez indépendantes. Voyez Genentech avec Roche, par exemple. Les biotechnologies sont tellement spécifiques qu'il ne faut pas perdre leurs caractères en fusionnant.

L'objectif de Genset n'est pas de s'associer de façon exclusive avec un groupe pharmaceutique. Je crois que c'est même tout le contraire de ce que nous avons voulu réaliser jusqu'à présent. Genset a en effet été conçue sur un modèle qui est celui de l'indépendance par rapport à l'industrie, indépendance au niveau du capital en particulier. Et je crois que nous avons eu raison.

Ce qu'il faut, en fait, c'est parvenir à un certain degré de maturité afin de pouvoir conduire des programmes de façon autonome, et collaborer avec l'industrie pharmaceutique mais peut être pas de manière exclusive. On peut en effet avoir plusieurs partenaires industriels. Le plus important est de garder la maîtrise des programmes et des applications afin qu'il y ait une logique de rentabilité à l'intérieur de la société et non à l'extérieur.

 

Contact

GENSET - Pascal Brandys - Tél. 43.56.59.00. Fax. 43.56.25.25.

GENSET Corp. (USA) - Tél. (619) 551.6551. Fax. (619) 551.6544.

Biotechnologies. GENETHON-INDUSTRIES, LA "GENETIC VALLEY" FRANCAISE

Il y a tout juste un an, Bernard Barataud, président de l'Association Française contre les Myopathies (AFM), présentait le projet Généthon-Industries. Objectif : réunir sur un même site, dans le département de l'Essonne, près de Paris, des sociétés de biotechnologies afin de créer un technopôle dans le domaine de la thérapie génique capable de rivaliser avec les "genoms centers" américains. L'enjeu est de taille puisque selon une étude du Bipe, ce marché est estimé à 300 milliards de francs d'ici à 2010. Depuis, la "Genetic Valley" d'Evry a vu l'ouverture récente du TGS, le laboratoire de Très Grand Séquençage, détenu à égalité par Genset et l'AFM. D'autres sociétés, des "start up" françaises mais également américaines, envisagent de rejoindre progressivement cette "tête de pont". A l'horizon 2000, Généthon-industries devrait ainsi constituer un des grands pôles internationaux regroupant centres de recherche fondamentale et appliquée ainsi que des unités de fabrication industrielle des médicaments.

Toute cette histoire commence en 1987. Daniel Cohen, généticien français décide alors de se lancer dans la cartographie du génome humain. Rappelons qu'à l'intérieur de chaque cellule humaine se trouve un noyau contenant les macromolécules porteuses de notre hérédité, l'ADN. Ce génome comme on l'appelle est une sorte de texte écrit avec quatre lettres, les bases nucléotidiques (Adénine, thymine, guanine, cytosine). Environ 2% seulement, soit 50 000 à 100 000 gènes dispersés au hasard le long de cette macromolécule enroulée sous la forme de 23 paires de chromosomes, représentent la partie signifiante, autrement dit la partie contenant un message.

On comprend pourquoi ce projet paraît alors insensé. Chercher à localiser cette partie signifiante, c'est-à-dire identifier les gènes et décrypter leur message sur cette macromolécule de deux mètres de long, ceci à l'échelle de l'angström, afin de dresser la carte complète du génome humain relève en effet de l'exploit. Pourtant, Daniel Cohen va parvenir à relever ce pari fou, grâce notamment à l'aide d'un personnage, Bernard Barataud, le président de l'AFM, l'association qui organise les fameux Téléthon, ces marathons audiovisuels qui, chaque année, font rentrer jusqu'à 350 millions de francs dans les caisses de l'AFM.

 

Objectif : mettre au point des thérapies géniques

Les résultats ne se font pas attendre. Fin 1993, le laboratoire Généthon, financé à 85% par les recettes du Téléthon, achève une cartographie qui couvre 60% du génome humain. Réaliser en un temps record, ce travail permet alors à l'AFM d'envisager de passer à une seconde étape, la mise au point de thérapies géniques. L'objectif de l'association est en effet de guérir au plus vite les maladies génétiques telles que les myopathies, la mucoviscidose ou des maladies plus complexes comme certains types de cancers. Aussi le programme Généthon 2, dirigé par le professeur Weissenbach, est-il lancé afin d'identifier les gènes responsables de ces maladies et de mettre au point des traitements de gènes défectueux par l'introduction d'autres gènes.

Afin de maîtriser la régulation des gènes réparateurs, l'AFM, en partenariat avec Genset, décide alors de construire le laboratoire de Très Grand Séquençage (TGS). Créée en 1989, cette société est le premier producteur mondial d'ADN synthétique. Pour les fondateurs de Genset, ce sont les gènes responsables de la régulation des programmes génétiques qu'il faut décrypter avant tout. C'est en effet la connaissance de ces parties du génome qui permettra d'ouvrir la voie vers les thérapies géniques. Depuis avril dernier, le TGS, grâce à des moyens automatisés, séquence et analyse le génome à raison d'un million de bases par jour. Fin 1996, 5% du génome humain, auront ainsi été séquencés et analysés.

 

Une "Vallée Biotech" près de Paris

En terme de santé publique, ce programme qui devrait déboucher sur la fabrication de médicaments constitue un enjeu majeur. Le marché thérapeutique issu de la connaissance des gènes pourrait en effet représenter un marché de 300 milliards de francs dans le monde à l'horizon 2010 selon une étude du Bipe (Bureau d'information et de prévisions économiques). Il est donc capital de ne pas rater le coche au moment même ou l'identification des gènes avance à grands pas. Bernard Barataud n'a d'ailleurs pas hésité à déclarer que "si nous ne réagissons pas, nous achèterons bientôt en dollars des médicaments américains, pour soigner nos chômeurs".

Raison pour laquelle l'AFM a décidé d'installer une "Vallée Biotech", près de Paris, dans le département de l'Essonne, en s'inspirant de ce qui se fait déjà dans ce domaine aux Etats-Unis, du côté de San Francisco. Le projet Généthon-Industries a pour objectif en effet de créer autour du laboratoire Généthon une concentration d'industriels dans le domaine des biotechnologies. A terme, plusieurs entreprises, des "start up" françaises, mais également américaines, devraient rejoindre le Généthon et le TGS afin de constituer une véritable capitale des technologies génétiques, une "Genetic Valley" rassemblant des centres de recherche fondamentale et appliquée ainsi que les sites de production industrielle des médicaments.

 

Plusieurs entreprises intéressées

Secrétaire général de l'AFM et chargé du projet Généthon-Industries, Pierre Birambeau est très confiant pour l'avenir mais souhaite pour l'heure ne pas trop en dire sur les développements qui pourraient intervenir très prochainement. Quoiqu'il en soit, plusieurs sociétés françaises travaillant dans le domaine de l'instrumentation ou développant des systèmes pour les thérapies géniques, des vecteurs par exemple, semblent très intéressées par ce projet et souhaitent y participer. On parle notamment de Protéine Performance, société de biopharmaceutique qui pourrait développer une nouvelle technologie fondée sur l'expression et la production de protéines recombinées dans les cellules d'insectes, de Cerep, concepteur de tests de pharmacologie moléculaire et cellulaire, etc....

Bénéficiant du soutient de la région, du département de l'Essonne, et de l'Etablissement Public de la ville d'Evry, la "Genetic Valley" se développe progressivement. "Cela va fonctionner", déclare avec sérénité Pascal Brandys, le Président Directeur Général de Genset. Pour l'heure, Evry constitue déjà un pôle important au plan mondial ce qui devrait entraîner son développement ultérieur.

 

Contact

AFM/Généthon - Pierre Birambeau - Tél. 69.47.29.79. Fax. 60.77.86.98.

 

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